L'angoisse du huitième mois, un peu de psy

09/07/2016 00:00

Phase symbiotique:

Les premiers mois, votre bébé est comme dans son monde tourné vers lui puisqu'il n'a pas encore conscience de ce qui est en lui et de ce qui est en dehors de lui. Progressivement, il regarde, découvre, essaie d'attraper ses mains puis ses pieds puis les objets autour de lui, sourit tout en n'ayant pas conscience encore que cela se vit à l'extérieur.

Psychiquement, votre enfant se vit comme faisant parti d'un tout avec vous, sa mère, comme si vous étiez en lui et comme si il était en vous. Vous n'êtes pas encore identifiée comme une autre personne. C'est comme si l'un pouvait remplir la fonction de l'autre. Vous ne vous distinguerez que progressivement. De votre côté vous vous trouvez encore dans un processus de régression primaire vous permettant de vous adapter le plus favorablement que vous puissiez à votre enfant. C'est pour cela, aussi, par exemple qu'une maman arrive vers son bébé au moment où il a besoin d'elle car elle sent qu'il appelle à un endroit d'elle (phénomène psychique nécessaire de régression de la mère pour s'adapter à son enfant dès la grossesse).

 

De la fusion à la reconnaissance :

Vers 6-7 mois, votre bébé commence doucement à prendre conscience de sa mère à l'extérieur.

C'est à ce moment là qu'il va chercher à faire connaissance visuellement mais surtout tactilement avec vous.

Il n'a de cesse de toucher votre visage de long en large en prenant son temps, de toucher vos lunettes, vos cheveux, vos boucles d'oreilles. Laissez le faire tant que personne ne se blesse et qu'il ne casse rien. Il est tout simplement en train d'apprendre à vous connaître, d'apprendre qui vous êtes et il est nécessaire qu'il puisse le faire. Il est en train de passer une sorte de scan pour vous reconnaître, vérifier les tours et pourtours de votre visage et ainsi se familiariser à vous. Il découvre et explore les endroits qui constituent votre image et vous spécifient. Il s'imprègne de votre image physique et image intérieure pour vous mémoriser. Il est en train d'établir un lien particulier qui le relie à vous; celui qui lui servira par la suite même pendant vos absences, surtout là.

Il vous examine de près, de loin puis procède à une revérification.

Il vérifie ensuite auprès des autres s'il retrouve ces traits qui vous déterminent et compare, en les touchant également, puis revient à votre visage pour un nouveau scan. Votre bébé se familiarise plus profondément à vous et en même temps prend conscience du différent de « la mère ».

Petit à petit, il commence à vous identifier comme « mère à l'extérieur » et découvre au fil de ses explorations l'environnement perçu autrement, comme étant à l'extérieur également.

Autour de huit mois (7-8 mois), il commence à en avoir plus conscience.

 

Questionnements :

Vous commencez à avoir pris des repères avec votre bébé et à vous connaître mais depuis un moment, il pleure quand vous sortez de la pièce où il se trouve. Il ne va plus comme avant dans les bras de sa grand-mère et tout le monde s'inquiète. Que se passe t' il ? Que lui arrive t' il ?

Tout va bien, vous pouvez vous rassurez. Il lui arrive quelque chose de plutôt bon, il grandit.

Avant, il était assez paisible, sécurisé même si sa mère s'éloignait, ça ne bougeait pas trop en lui. Maintenant, ce nouvel état déclenche chez lui une forme d'angoisse car sa mère qui s'éloigne se vit comme élément psychique à l'extérieur. Si elle est à l'extérieur, on peut comprendre que ça bouge pour votre bébé au niveau de sa structure psychique. Il vit ces temps comme des temps de séparation (physique et psychique) et cette prise de conscience, rappelez vous, est nouvelle pour lui. La quantité au niveau de l'espace-temps pour votre bébé ne représente pas la même que pour un adulte à ce moment là. Il les vit telle une « séparation-disparition » bien plus importante que ce qu'elle représente pour vous. Si vous pouvez disparaître, alors reviendrez vous ?

 

La peur de ce qui est étranger à "la mère" perçue comme "bonne mère" :

A cette période (7-8 mois), il peut alors avoir une certaine appréhension ou exprimer des pleurs en présence d'une personne peu connue ou étrangère, surtout si elle cherche à s'approcher de trop prêt de votre enfant. La même chose s'il n'a plus votre contact visuel.

C'est une étape sensible pour votre enfant et il a besoin dans un premier temps d'être rassuré par votre rapprochement, votre présence physique contenante plutôt que de dispersion vers l'extérieur qui ne ferait que rajouter une source d'angoisse supplémentaire. Ce dont il a besoin dans ces conditions, c'est d'être pris dans les bras, que vous lui parliez tranquillement, que vous cherchiez à l'apaiser, que vous fassiez confiance sereinement en ses capacités de progrès dans son développement.

 

Accompagnement par le jeu :

Ensuite, lors de moments paisibles, amusez vous avec lui à des jeux dits de « coucou » qui consistent à vous cacher, à côté de lui, derrière vos mains ou autre objet puis à réapparaitre. Ces jeux favoriseront sa réassurance lors de cette période sensible. Ainsi il se familiarise à votre disparition-réapparition. Si vous le faites souvent, ça permettra de le rassurer de plus en plus.

Il s' aperçoit que lorsqu'il ne vous voit plus sur un laps de temps, ce qui l'angoisse, il finit toujours par vous retrouver. Il ne vous a pas perdu en quelque sorte. Vous ne disparaissez pas à tout jamais et c'est sur cela qu'il a besoin d'être rassuré. Ces jeux deviennent rapidement amusants et contribuent à le soutenir émotionnellement sur du long terme à propos de cette étape. Evidemment, ça va sans dire mais ça va mieux en le disant...la parole rassurante qui accompagne, les mots posés sur ce qu'il vit sont toujours nécessaires et importants.

 

Différences individuelles :

Encore une fois, il y a autant de vécus différents qu'il y a d'enfants tant au niveau du timing qu'au niveau de la quantité et de la qualité de cette période sensible. Tout dépendra de son histoire (ce qu'il aura vécu depuis sa conception) et surtout du lien d'attachement qu'il aura pu établir avec vous depuis le début (en référence à l''attachement de John Bowlby).

 

L'environnement suffisamment bon :

Plus l'environnement aura répondu rapidement, favorablement, de manière adaptée à ses besoins, plus vous aurez eu une véritable disponibilité psychique avec votre enfant dés ses premiers mois (vous êtes complétement présent psychiquement au moment où vous vous occupez de votre enfant sans penser à la liste de courses à faire pour le lendemain ou à vos soucis au travail), plus les interactions avec vous auront été agréables, plaisantes, plus alors votre enfant aura commencé à construire une sécurité intérieure qui favorisera le passage de cette angoisse à ce moment là. Ce sera plus facile à vivre pour lui. Il s'agit d'un processus primordial qui repose sur le lien d'attachement pour l'enfant dans la relation à sa mère (la manière dont on aura pris soin de l'enfant, répondu le plus favorablement possible à ses besoins, affectifs essentiellement).

C'est pour cela qu'il est parfois délicat de confier son enfant à une autre personne à cette période sensible autour du huitième mois Pour certains enfants, ce peut-être très difficile à vivre. Cela nécessite alors que vous passiez beaucoup de temps avec la personne qui s'en occupera par la suite.

 

Adaptation :

La fameuse période d'adaptation qui nécessite d'être prise en compte, aménagée en fonction des vécus mère-enfant.

Il est important que votre enfant puisse se familiariser en douceur et s'adapter à cette nouvelle personne, futur référente pour votre enfant (en psycho: figure d'attachement, cf : Bowlby- Winnicott) et à son nouvel environnement, en votre présence et à son rythme. Cela demande aux adultes présents à être vigilant aux signaux de votre bébé et de lui permettre de s'habituer sur une période progressive. Cette personne a besoin de rassembler un maximum d'éléments dont vos habitudes, votre manière d'être avec votre enfant pour ensuite être au plus juste dans ses soins avec ce que connait votre enfant. La personne deviendra plus tard sa référente en votre absence (et jamais sa remplaçante en raison de la place qui n'est pas la même) ce qui impose de sa part un travail minutieux de repérages dans vos fonctionnements. Et pensez qu'une maman sereine= un bébé serein. Si tout le monde y fait attention en proposant un environnement « suffisamment bon », surtout les professionnels qui prendront le relai, ça ne pourra que favoriser l'accueil de votre enfant.

« L'environnement suffisamment bon » est un concept essentiel en psychanalyse ( référence : winnicott).

Votre enfant est simplement en voie de se différencier et cela fait parti de son développement pour grandir et s'individuer, devenir autonome. Cette étape est donc nécessaire, humaine, naturelle et va passer en prenant soin de votre relation.